L'ARMÉE FORCE DE L'ORDRE

<= L'armée française de l'été 14


A la belle époque le recours à l'armée était fréquent lors de troubles liés notamment aux grèves, qui pouvaient être trés longues et viraient parfois à l'émeute. L'armée devait alors contenir et charger les manifestants, défendre les usines, mines, réseaux ferrés, et parfois même suppléer les ouvriers et employés récalcitrants (comme lors de la gréve des postiers en 1909 ou des cheminots en 1910). Ainsi pour le premier mai 1906 le préfet de police Lépine avait mobilisé 60.000 troupiers pour maintenir l'ordre à Paris. 

Légalement l'armée française pouvait en effet être réquisitionnée pour des opérations de maintien de l'ordre, ou bien pour faire appliquer les lois, sur demande de l'autorité civile (maire, gendarmerie, police, préfet, etc.). Elle agit en se concertant avec l'autorité civile. L'armée était autorisée à faire usage de ses armes dans les cas suivants:


Dans les deux premiers cas, le commandant de la troupe doit avertir les assaillants, si la soudaineté de l'attaque ne lui en enlève pas les moyens, que l'emploi des armes va être ordonné (roulements de tambours, sonneries gardes à vous, avis répétés à haute voix). Il doit laisser s'écouler autant de temps que la sécurité de sa troupe peut accepter.


On ne peut que constater avec regret qu'au moment où se crée véritablement l'armée de citoyens, cette armée se voit confier des missions de maintient de l'ordre qui la tiraille. En 1891, elle doit tirer sur des mineurs grévistes à Fourmies dans le nord, en 1900 elle tire sur des ouvriers à Draveil, en 1906 elle intervient lors des grèves consécutives à la catastophe de Courrières, en 1907 elle tire sur des viticulteurs à Narbonne, en 1908 elle doit tirer sur des ouvriers à Villeneuve-saint-georges, etc.

Répression lors des émeutes de Fourmies:

Répression lors des émeutes de Fourmies

Chantier protégé par la troupe, suite aux grèves dans la bâtiment - supplément illustré du petit journal Dimanche 23 octobre 1898:

Grévistes lors de la catastophe de Courrières - supplément illustré du petit journal Dimanche 1er avril 1906:

Catastrophe des Courrières

1er mai 1906 à Paris - Le petit journal 13 mai 1906

Troubles lors du 1er mai 1906 à Paris

Intervention de la troupe lors de la gréve des cheminots sur le réseau nord en 1910:

Expulsion des chartreux de leur monastère 1903 (abbaye de la grande chartreuse - isère):

La troupe garde un chantier déserté lors de la grève générale du batiment en 1911

Ouvriers révoltés devant les faisceaux de l'infanterie de ligne:

Ouvriers grévistes devant les faisceaux de l'infanterie


Source:  L'infanterie en un volume, Manuel d'instruction militaire - Librairie Chapelot - 1914

Annexe - Gloire au XVII°: Gaston Brunswick dit Monthéus est un chansonnier né peu aprés la commune, élevé dans un milieu communard et se présentant lui même comme un révolutionnaire cocardier, avec le coeur du coté des damnés de la terre

En 1907 la troupe doit intervenir contre des vignerons à Béziers, mais les soldats du XVII°, originaires de la région, se mutinèrent et sympatisèrent avec les manifestants (aprés les événements ils seront envoyés à gafsa, puis le bataillon sera dissous). Monthéus composa alors Gloire au XVII° en leur honneur, ce qui lui apporta la renommée. Cette chanson appartient depuis au folklore révolutionnaire. On peut se procurer une version enregistrée de cette chanson dans l'album chansons contre de Marc Ogeret.

A cette époque en effet la chanson fait partie de la culture populaire, car les ouvriers et paysans ne peuvent que difficilement avoir accés aux livres. La chanson était donc réellement un outil de propagande.

Le 17° de ligne met crosse en l'air:

Comme beaucoup, Monthéus changea totalement d'opinion en août 1914 et se fit alors le chantre de l'union sacrée, et chanta des chansons militaristes.

- 1 -

Légitim' était votre colère
Le refus était un grand devoir
On ne doit pas tuer ses pères et mères
Pour les grands qui sont au pouvoir
Soldats votre conscience est nette
On n'se tue pas entre Français
Refusant d' rougir vos baïonnettes
Petits soldats oui vous avez bien fait

Refrain

Salut, salut à vous
Braves soldats du Dix-septième
Salut braves pioupious
Chacun vous admire et vous aime
Salut, salut à vous
A votre geste magnifique
Vous auriez en tirant sur nous
Assassiné la République

- 2 -

Comm' les autres vous aimez la France
J'en suis sur même vous l'aimez bien
Mais sous votre pantalon garance
Vous êt's restés des citoyens
La Patrie c'est d'abord sa mère
Cell' qui vous a donné le sein
Et vaut mieux même aller aux galères
Que d'accepter d'être son assassin

- 3 -

Espérons qu'un jour viendra en France
Où la paix la concorde règnera
Ayons tous au coeur cette espérance
Que bientôt ce grand jour viendra
Vous avez j'té la premièr' graine
Dans le sillon d'l'humanité
La récolte sera prochaine
Et ce jour-là vous serez tous fêtés.